Tiers-payant, prévention, accès aux soins, hôpital… : les grandes orientations du projet de loi santé

Généralisation du tiers-payant, prévention, hôpital, mesures pour l’innovation… Marisol Touraine, la Ministre des Affaires sociales et de la santé, a présenté jeudi les orientations du projet de loi santé qui sera examiné début 2015 à l’Assemblée nationale.

Parmi les principales mesures annoncées, la généralisation du tiers-payant à la fois pour la part correspondant à celle de l’assurance maladie et pour celle des complémentaires. Dès l’an prochain, les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé seront ainsi dispensés d’avance de frais. « Pour parvenir à une solution rapide, l’Assurance maladie sera pour cette première étape l’interlocuteur privilégié des médecins, comme elle l’est déjà pour la couverture médicale universelle. Cette décision n’emporte pas de conséquences sur les dispositifs déjà existants chez d’autres professionnels de santé, comme les pharmaciens, par exemple », a indiqué la ministre. D’ici 2017, le tiers-payant sera étendu à tous les assurés.

« Par ailleurs, le projet de loi garantira aux personnes modestes des prix accessibles pour des produits de santé, tels que les lunettes. Je proposerai, enfin, un dispositif renforcé contre le refus de soins », a précisé la Marisol Touraine.

Autre mesure concernant l’accès aux soins, la mise en place d’un numéro d’appel unique à 3 chiffres dans chaque département pour la garde en ville. « Les Français doivent pouvoir trouver un professionnel de santé près de chez eux », a déclaré la ministre précisant que « le service territorial organisera la réponse aux soins urgents et non-programmés. Comment faire face à la poussée de fièvre d’un enfant au milieu de la nuit ? Où trouver un médecin un dimanche après-midi ? ».

La loi proposera d’instaurer un « GPS en santé ». Le service public d’information en santé, qui se met en place au niveau national, prendra la forme d’un portail web, avec une adresse unique, facile à mémoriser. Il sera aussi accessible par téléphone. Les ARS auront pour mission de le décliner au niveau régional.

Un parcours éducatif en santé dès l’école

Concernant le volet prévention, la ministre a annoncé la mise en place dès l’école d’un parcours éducatif en santé. Il permettra à tous les enfants, de la maternelle au lycée, d’acquérir des connaissances en santé et d’adopter les bons réflexes. « Il ne s’agit pas d’avoir une heure de cours par-ci, par-là sur la santé. Il s’agit que les enjeux de santé imprègnent le contenu de tous les enseignements », a indiqué Marisol Touraine.

La ministre s’est également déclarée favorable à un outil permettant de rendre compréhensible une information, aujourd’hui trop complexe, sur la qualité nutritionnelle des produits alimentaires industriels. « De nombreuses marques m’ont fait part de leur intérêt pour une telle démarche. Il nous faut faire aboutir la réflexion sur ce que pourra être cet outil », a-t-elle déclaré.

Un « service public hospitalier rénové »

La loi consacrera un service public hospitalier rénové conçu comme un « bloc d’obligations ». « Les établissements privés à but non lucratif sont évidemment appelés à y participer. Les établissements privés à but lucratif le pourront, s’ils respectent ce bloc d’obligations », a indiqué la ministre. La loi garantira aux usagers la permanence d’accueil et de la prise en charge ; le respect d’un délai de prise en charge raisonnable compte tenu de l’état du patient ; l’égalité d’accès aux soins.

Marisol Touraine souhaite également  « tourner la page de certaines pratiques ». « Nous clarifierons les conditions de l’exercice libéral à l’hôpital. Nous ferons de même pour l’intérim médical, en plafonnant les rémunérations et en encadrant ce qui est devenu un véritable marché de mercenaires », a-t-elle annoncé.

Dans le même temps, l’hôpital sera doté d’une responsabilité nouvelle vis-à-vis de son territoire. Pour y parvenir, la loi rendra obligatoires les groupements hospitaliers de territoire qui permettront la mutualisation de certaines activités comme par exemple les systèmes d’information, la formation initiale ou les fonctions centrales comme les achats. Et, désormais, sur un même territoire, les établissements porteront un projet médical commun.

« Le pari de l’innovation »

« Biotechnologies, nanotechnologies, médecine personnalisée et prédictive, thérapie génique : les enjeux liés à la recherche et à l’innovation en santé sont immenses pour les patients et les professionnels », a indiqué Marisol Touraine. « (…) Nos entreprises et nos startups construisent, elles aussi, la France des technologies médicales. Le secteur de l’e-santé connaîtra à lui seul une croissance de 4% à 7% par an dans les prochaines années. Cette position, nous devons la consolider, car la concurrence internationale est vive » a-t-elle estimé.

« Pour les hôpitaux, les délais concernant les essais cliniques à promotion industrielle vont d’ores et déjà passer de 18 mois à 2 mois. Le projet de loi proposera de généraliser le dispositif de la convention unique à l’ensemble des catégories d’établissements de santé », a annoncé la ministre.
Le projet de loi reconnaîtra de nouveaux métiers, notamment les professions paramédicales à pratiques avancées (infirmiers cliniciens, sages-femmes). « Avec Geneviève Fioraso, nous avons depuis 18 mois lancé une réflexion toujours en cours sur la réorganisation du troisième cycle des études médicales pour le rendre plus professionnalisant encore. Nous corrigerons également les imperfections du dispositif du développement professionnel continu », a annoncé la ministre.

« La France au rendez-vous de l’open data ».

« L’open data est un enjeu technique, scientifique et démocratique majeur. Il nous faut prolonger le mouvement d’ouverture des données de santé. J’attache une importance toute particulière aux conditions de mise à disposition des données, et en particulier celle du respect de la vie privée. Un important travail a été conduit par la commission open data ; il inspirera les dispositions de la future loi » a également indiqué la ministre.

Autre mesure étudiée, la mise en place des actions de groupe. « La maturité de la démocratie sanitaire, c’est également le renforcement du pouvoir des patients lorsqu’ils sont les victimes de dommages », a indiqué Marisol Touraine. En effet, « face aux dommages sériels en santé », un droit nouveau pourrait être envisagé : l’instauration d’une action de groupe. « Cela représentera une avancée majeure. Les indemnisations y seront, certes, déterminées de manière individuelle, mais désormais nos concitoyens ne seront plus seuls face à la puissance de certaines industries », a annoncé la ministre.

Marisol Touraine a enfin indiqué que la concertation se poursuivra dans les prochains jours avec l’ensemble des acteurs du monde de la santé, jusqu’à l’envoi du texte au Conseil d’Etat cet été. En septembre, elle présentera le projet de loi en Conseil des ministres qui sera ensuite transmis à l’Assemblée nationale. Son examen commencera au début de l’année 2015.