Deux nouveaux groupes sanguins identifiés

Deux nouveaux systèmes de groupes sanguins, Langereis (Lan) et Junior (Jr), viennent s’ajouter à la liste des 30 déjà référencés. Outre les systèmes ABO et Rhésus, chaque individu possède un lot de groupes sanguins complémentaires, plus ou moins rares, susceptibles de mener à des accidents transfusionnels ou des incompatibilités fœto-maternelles. Cette double découverte exceptionnelle publiée dans Nature Genetics peut être salvatrice pour les patients de groupe sanguin Lan- ou Jr-.

L’énigme a été résolue par des chercheurs de l’Institut National de la Transfusion Sanguine (INTS, Paris) grâce en particulier à l’aide du Pr Hervé Puy (Unité Inserm 773 au Centre de Recherche Biomédicale Bichat-Beaujon-Centre Français des Porphyries) et du Dr Maude Le Gall (Unité Inserm 872 au Centre de Recherche des Cordeliers). A partir de ces anticorps atypiques, les chercheurs ont réussi à identifier les antigènes incriminés. Il s’agit en fait de deux protéines présentes à la surface des globules rouges et d’autres cellules de l’organisme, et qui permettent de transporter de nombreuses substances hors des cellules. « Les personnes de groupe sanguin Lan- et Jr- ne produisent pas, respectivement, les transporteurs ABCB6 et ABCG2 et développent des anticorps en cas d’exposition. C’est la première fois que cette famille de protéines est identifiée comme porteuse d’antigènes de groupes sanguins » explique Hervé Puy.

Deux groupes sanguins rares

Ces personnes de groupe sanguin Lan- ou Jr- sont rares en France mais plus de 50 000 personnes sont Jr- au Japon. « Actuellement, il faut malheureusement attendre un accident transfusionnel ou une incompatibilité fœto-maternelle pour rechercher la présence ou non de ces deux nouveaux groupes sanguins, explique le Dr Lionel Arnaud qui a dirigé les travaux à l’INTS. Mais la découverte de leur base moléculaire permet maintenant de les identifier en 24 heures grâce à la génétique, ce qui permet d’intervenir très rapidement auprès des patients, mais aussi de faciliter la constitution de stocks pour ces types de sangs rares. »

Une application probable en cancérologie

En outre, ces transporteurs sont déjà connus pour leur rôle néfaste chez les patients atteints d’un cancer. ACBG2 est surexprimé dans de nombreux cancers et participe au développement de résistances aux chimiothérapies. Jusqu’à présent, les chercheurs étaient réticents à le bloquer pour lutter contre ces résistances, ne connaissant pas son rôle physiologique. Ces travaux montrent que les personnes de groupe sanguin Jr- s’en passent très bien et que l’inhibition de ABCG2 est donc une solution envisageable pour améliorer la sensibilité des patients à la chimiothérapie.

Sources : Inserm

Virginie Helias, Carole Saison, Bryan A Ballif, Thierry Peyrard, Junko Takahashi, Hideo Takahashi, Mitsunobu Tanaka, Jean-Charles Deybach, Hervé Puy, Maude Le Gall, Camille Sureau, Bach-Nga Pham, Pierre-Yves Le Pennec, Yoshihiko Tani, Jean-Pierre Cartron & Lionel Arnaud. ABCB6 is dispensable for erythropoiesis and specifies the new blood group system Langereis. Nature Genetics 44, 170–173 (2012) doi:10.1038/ng.1069

Carole Saison, Virginie Helias, Bryan A Ballif, Thierry Peyrard, Hervé Puy, Toru Miyazaki, Sébastien Perrot, Muriel Vayssier-Taussat, Mauro Waldner, Pierre-Yves Le Pennec, Jean-Pierre Cartron & Lionel Arnaud. Null alleles of ABCG2 encoding the breast cancer resistance protein define the new blood group system Junior. Nature Genetics 44, 174–177 (2012) doi:10.1038/ng.1070