Biosimilaires : Claude Le Pen s’interroge sur le choix de la France d’une substitution officinale

L’économiste Claude Le Pen vient de publier un rapport, avec le soutien d’Amgen, qui aborde les biosimilaires, ces« copies » légales des biomédicaments tombés dans le domaine public, en 15 grandes questions. Pour Claude Le Pen comme pour le laboratoire, « une parfaite connaissance des enjeux, doublée d’une réflexion concertée entre les acteurs, est nécessaire pour soutenir et encadrer l’essor des biosimilaires de façon efficiente ».

Dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2014, la France formule une proposition inédite en Europe pour soutenir leur développement : autoriser le pharmacien d’officine à substituer un biomédicament par son biosimilaire en initiation de traitement. Les modalités d’application de cette mesure font actuellement débat. « En apportant son soutien à l’analyse de Claude Le Pen, Amgen souhaite contribuer à une réflexion aussi documentée que possible et aider à construire la confiance envers ces nouveaux médicaments », explique la société.

Amgen, qui développe actuellement plusieurs biosimilaires avec comme horizon la commercialisation de sa première molécule en 2017, indique vouloir « mettre à profit son expertise unique pour faire valoir les particularités des biosimilaires et rappeler les conditions réglementaires, médicales et techniques qu’il convient d’exiger de ces produits ».

Les biosimilaires en 15 questions aborde avec pédagogie les fondamentaux techniques, réglementaires et économiques nécessaires pour saisir tous les enjeux des changements et les arbitrages en cours autour de ces produits. Pour Claude Le Pen, le moment est particulièrement bien choisi car « la question des biosimilaires est en train de prendre une dimension nouvelle. Pour nous Français, le vote de l’article 47 de la LFSS qui met en place une politique de substitution est un événement majeur : la France est le premier pays en Europe à adopter officiellement une telle législation.

L’actualité, c’est aussi l’autorisation de mise sur le marché européen du premier biosimilaire d’anticorps monoclonal dans les rhumatismes inflammatoires, les promesses du Président Obama d’aboutir à une législation aux Etats-Unis, l’ouverture de réflexions sur ce sujet à l’OMS… sans compter évidemment les échéances des brevets de plusieurs médicaments biologiques majeurs qui approchent. » En travaillant sur son rapport, l’économiste de la santé a été frappé par l’hétérogénéité de la situation : définitions, réglementations et marchés se révèlent très différents d’un pays à l’autre.

Par ailleurs, Claude Le Pen a remarqué « l’assimilation, encore très présente en France, des biosimilaires aux génériques des médicaments chimiques, alors même que la définition légale du biosimilaire précise que la législation des génériques ne peut, ni ne doit, s’appliquer à ces produits. » En effet, les biosimilaires ne sont pas de simples génériques des médicaments de biotechnologie, comme on les présente parfois. Ils relèvent d’une nouvelle catégorie de produits qui, par rapport à une molécule de référence, ne sont ni totalement identiques ni totalement différents. Pour l’auteur, « c’est un nouveau concept qu’il faut penser en soi et pas par assimilation à une catégorie existante, car il soulève des questions inédites. »

La France prend le tournant des biosimilaires

D’ici à 2020, les brevets des 10 biomédicaments qui représentent à eux seuls plus de 10 % du marché pharmaceutique, devraient tomber dans le domaine public. En France, on estime que l’arrivée des biosimilaires de ces biomolécules pourrait générer, selon les scénarios, de 500 millions à 1 milliard d’euros d’économies par an. Les modalités de mise en oeuvre du principe de substitution décidé par notre pays doivent encore être précisées.

Pour Claude Le Pen comme pour Amgen, une parfaite connaissance des enjeux, doublée d’une réflexion concertée entre les acteurs, est nécessaire pour soutenir et encadrer l’essor des biosimilaires de façon efficiente. Contrairement à certaines idées reçues, la France n’est pas en retard dans l’utilisation des biosimilaires, et ceci sans incitation particulière des pouvoirs publics. « A part peut-être le cas particulier de l’Allemagne, la France fait plutôt figure de pays pionnier en matière de biosimilaire. Le taux de pénétration des trois principaux biosimilaires présents en France est de 36% selon les données communiquées en mars par IMS Health, avec des médicaments biosimilaires qui, d’ailleurs, dominent souvent leur marché. » Pour Claude Le Pen, « la situation n’est donc pas comparable à celle du générique, qui était peu prescrit en France en 1994, au moment de la mise en place d’une politique volontariste, alors qu’il était beaucoup plus développé dans les autres pays de même profil que le nôtre. »

Dans son rapport, Claude Le Pen s’interroge sur le choix de la France d’une substitution officinale, pour lui « le biosimilaire reste un produit de prescription et non un « simple » produit de substitution officinale. Compte tenu de la gravité des pathologies auxquelles ces produits sont généralement destinés comme le cancer ou les maladies auto-immunes, l’engagement du prescripteur me semble un élément important de la crédibilisation du biosimilaire. »

Source : Amgen / Rapport Les Biosimilaires en 15 questions