Autisme: un modèle de souris pour comprendre les causes synaptiques

Une étude, publiée le 29 avril 2012 dans la revue Nature, présente la première caractérisation neurobiologique et comportementale d’une souris mutée pour le gène SHANK2 qui est associé à l’autisme chez l’homme. En février dernier, l’équipe du Pr Thomas Bourgeron avait démontré que des mutations génétiques dans SHANK2 identifiées chez des patients avec autisme perturbaient le nombre de synapses, points de contact entre les neurones.
Ces nouveaux résultats obtenus sur des souris mutantes pour SHANK2 confirment la diminution des synapses et pointent des anomalies spécifiques de certaines régions du cerveau. De plus, les souris sont hyperactives, elles présentent des problèmes d’interactions sociales et vocalisent moins et différemment que les souris non mutées. Ces résultats permettent de mieux comprendre l’origine neurobiologique des troubles du spectre autistique. Ils sont le fruit d’une collaboration franco-allemande entre une équipe de l’unité de Génétique humaine et fonctions cognitives (Institut Pasteur, CNRS, Université Paris Diderot) et des chercheurs de l’université d’Ulm (Allemagne) et du centre de Neuroscience de Berlin (Allemagne).

Les troubles du spectre autistique (TSA) regroupent un ensemble hétérogène de maladies du développement neurologique dont les origines génétiques sont mal connues. Des mutations dans plus d’une centaine de gènes ont déjà été associées aux TSA, mais il est difficile d’évaluer leurs rôles précis dans les fonctions neurales et de hiérarchiser leur importance relative. Les analyses génétiques menées au sein de l’unité de Génétique humaine et fonctions cognitives (Institut Pasteur, CNRS, Université Paris Diderot) ont permis de mettre en évidence des mutations dans des gènes codants des protéines localisées au niveau des synapses, les points de contact et de communication entre les neurones. Un de ces gènes, SHANK2, a été associé récemment à l’autisme et a permis de confirmer le rôle des anomalies synaptiques dans l’autisme*.

Les nouveaux résultats publiés le 29 avril 2012 dans la revue Nature montrent l’effet de la perte de ce gène SHANK2 chez la souris. Les chercheurs du groupe de Tobias Boeckers (Ulm, Allemagne) ont montré que les souris mutées dans le gène SHANK2 avaient moins de synapses que les souris non mutées. L’analyse comparée de plusieurs régions du cerveau a montré que l’impact de la mutation différait selon les régions du cerveau (impact fort dans le striatum, modéré dans l’hippocampe et faible dans le cortex). D’autre part, le groupe de Michael R. Kreutz (Berlin, Allemagne) a montré que les courants synaptiques sont aussi différents.

Enfin, le comportement de la souris a été étudié par le Dr. Elodie EY dans l’équipe du Pr Thomas Bourgeron, chef de l’unité de Génétique humaine et fonctions cognitives (Institut Pasteur, CNRS, Université Paris Diderot). Les souris ne montrent pas de problèmes physiques majeurs ni de problèmes de mémoire. Par contre, elles sont hyperactives et plus anxieuses par rapport aux souris non mutées. De façon intéressante, les souris présentent aussi des problèmes d’interactions sociales ainsi qu’une baisse du nombre et une altération de la structure des vocalisations ultrasonores. Le rôle de ces vocalisations ultrasoniques n’est pas encore bien compris mais le fait qu’elles soient quantitativement et qualitativement différentes chez les souris mutantes ouvre de nouvelles voies pour l’étude plus approfondie des mécanismes sous-jacents à la communication vocale.

« L’établissement de modèles animaux est crucial pour comprendre les origines multiples de l’autisme » explique le Pr Thomas Bourgeron, chef de l’unité de Génétique humaine et fonctions cognitives. (Institut Pasteur, CNRS, Université Paris Diderot). « Nous espérons qu’ils permettront d’identifier de nouveaux traitements basés sur les connaissances acquises ».

Autistic-like behaviours and hyperactivity in mice lacking ProSAP1/Shank2, Nature, 29 avril 2012

Source : Institut Pasteur