Consommation de médicaments et disparités régionales : 560 millions d’économies potentielles, selon une étude IMS HEalth

Une étude menée par IMS Health montre des disparités régionales significatives en matière de consommation de médicaments de prescription et particulièrement pour les médicaments génériques, sans que les variations d’une région à l’autre puissent s’expliquer par l’incidence des pathologies concernées. L’étude propose plusieurs pistes d’action pour réduire ces écarts, améliorer la pertinence des actes et prestations et au final réaliser près de 560 millions d’économies potentielles en remboursement.

Avec 22,6 milliards d’euros par an (chiffres Cnamts 2013), soit 20 % des dépenses de santé, la dépense de médicaments est un poste de dépenses fortement encadré par les pouvoirs publics. Les mesures de régulation votées chaque année ont généralement une portée nationale, sans prise en compte d’éventuelles divergences au niveau régional et local. Or, les disparités pointées par l’étude IMS Health montrent qu’il pourrait être utile d’agir sur les variations de consommation d’une région à l’autre, à la fois pour homogénéiser les prises en charge et optimiser les dépenses par catégorie de produits. Dirigée par Stéphane Sclison, directeur de la stratégie d’IMS Health, l’étude permet de quantifier à la fois en volume et en valeur les écarts de consommation de médicaments prescrits.

De fortes disparités de consommation en volume et en valeur

La consommation par habitant en volume varie fortement : de 11 % sous la moyenne nationale en région Ile-de-France à 21 % au-dessus de la moyenne en région Limousin. En valeur, la consommation par habitant varie de façon inverse, de 9 % sous la moyenne nationale en région Limousin à 11 % au-dessus de la moyenne en région Ile‐de-France. « Plus on consomme, moins les produits consommés sont chers, relève Stéphane Sclison. Mais l’analyse établit également de façon plus surprenante que le niveau de vie moyen d’une région est inversement proportionnel à la consommation de médicaments. Plus il est élevé et plus la consommation est basse. » Il apparaît en outre que la densité médicale (nombre de médecins par habitant) n’est pas un facteur explicatif des différences de volumes de consommation, ce qui va à l’encontre d’une idée communément répandue.

Différences marquées sur le taux de substitution des médicaments génériques

Si l’on s’intéresse aux seuls médicaments génériques, l’étude fait apparaître de faibles différences chez les médecins sur les taux de prescriptions substituables (dites « dans le répertoire »), de 65 à 68 %, mais une différence plus marquée sur le taux de substitution effectif en pharmacie, de 67 % (Corse) à 84 % (Pays‐de-Loire). On observe donc moins de variation dans le comportement des « Mesurer et appréhender les enjeux de la Santé » médecins en matière de prescription substituable que dans l’acte effectif de substitution chez le pharmacien. Ces disparités sont plus fortes si l’on analyse les données par pathologie. Sur le générique, des régions apparaissent plus « vertueuses », avec des taux de substitution (pharmacien) et/ou de prescriptions substituables (médecin) supérieurs à la moyenne nationale : Bretagne, Pays‐de‐Loire, Basse‐Normandie, Poitou–‐Charentes. A l’inverse, les régions Ile-de-France, Alsace et Corse ne montrent des taux supérieurs à la moyenne nationale que sur très peu de classes thérapeutiques, en particulier pour le taux de substitution en officine.

Des études et actions par région et par pathologie

A titre d’illustration, l’étude se penche sur deux pathologies en particulier : le diabète et le cancer. Des pathologies très coûteuses pour la société : la Haute Autorité de Santé avait chiffré le coût du diabète à 12,5 milliards d’euros annuels (Etude ENTRED, janvier 2013), tandis qu’une équipe britannique avait estimé le coût total du cancer à 17 milliards d’euros pour la France (The Lancet Oncology, 2009). « L’analyse révèle là aussi des disparités fortes quant au nombre d’unités médicamenteuses par patient, leur valeur moyenne et le comportement vis-à-vis du générique, souligne Stéphane Sclison. Pour le cancer, le coût moyen des produits prescrits serait à analyser en détail pour les régions Auvergne, Bourgogne, Corse, Limousin et Picardie qui montrent un coût significativement plus élevé que la moyenne nationale. Pour le diabète, si l’on retrouve la Corse et le Limousin, le Languedoc-Roussillon est aussi une région avec des coûts plus élevés que la moyenne nationale. Pour le cancer, comme pour le diabète, on ne peut donc pas imputer les différences de consommation au nombre de médecins spécialistes présents dans chaque région. En revanche, l’utilisation des génériques a un fort impact sur le coût des médicaments pour le diabète, et moins marqué pour le cancer. Cela confirme l’intérêt d’utiliser les données de cette étude pour développer des études et actions ciblées par région.

Deux modèles d’action pour des économies substantielles

Il ressort de l’étude que des leviers d’action existent pour gommer des disparités qui ne sont pas justifiées par des différences épidémiologiques interrégionales ou d’autres facteurs tels que l’âge moyen. Deux modèles sont appliqués : le premier est une approche par pathologies; le second se concentre sur les pratiques en matière de médicament générique. Le premier modèle simule l’alignement sur la moyenne nationale, pathologie par pathologie, du coût moyen du médicament prescrit dans les régions les plus chères. Le second modèle propose l’alignement sur la moyenne nationale des pratiques médicales et pharmaceutiques relatives au seul générique (taux de prescription dans le répertoire et taux de substitution en pharmacie), là aussi pathologie par pathologie.

560 millions d’économies potentielles en remboursement

Selon les projections d’IMS Health, l’optimisation issue du premier modèle permettrait de générer une économie de 738 millions d’euros en base de remboursement, soit 560 millions d’euros en remboursement effectif, c’est-à-dire au taux moyen actuel de prise en charge du médicament. La simulation se limitant à une harmonisation des pratiques vis-à-vis des seuls génériques évalue le potentiel d’économies à plus de 175 millions d’euros en remboursement, notamment pour les produits liés à l’hypertension (17 millions), l’asthme (13 millions), les pathologies digestives (10 millions) ou la maladie d’Alzheimer (10 millions). « Ces disparités sont suffisamment fortes pour attirer l’attention des autorités de santé sur l’intérêt d’adopter une approche par régions, voire par départements, et par pathologies ou par groupes de classes thérapeutiques, conclut Stéphane Sclison. A côté des grandes mesures générales qui s’appliquent à des classes entières de médicaments, l’étude montre que l’on peut parvenir à un niveau d’analyse plus fin et envisager des actions correctrices susceptibles de généraliser des bonnes pratiques et de générer des économies non négligeables pour la collectivité. »

Source : Communiqué IMS Health