Syndrome de l’X fragile : désignation orpheline pour une molécule développée par le CNRS

L’Agence européenne des médicaments (EMA) vient d’accorder la « désignation orpheline » à la molécule BMS 204352(1) développée par le CNRS pour le traitement du syndrome de l’X fragile, une maladie génétique rare pour laquelle il n’existe aucun traitement à ce jour.

Le docteur Sylvain Briault, du Centre hospitalier régional d’Orléans et son équipe du laboratoire Immunologie et neurogénétique expérimentales et moléculaires –INEM (CNRS/Université d’Orléans) vont ainsi bénéficier d’une assistance protocolaire de l’EMA lors du développement clinique.

Cette maladie génétique entraîne un déficit intellectuel souvent associé à des troubles du comportement de type autistique ainsi qu’à des signes physiques caractéristiques. Touchant près d’une naissance pour 4 000, c’est une des maladies rares les plus fréquentes, mais aucun traitement n’existe à ce jour. De précédentes recherches menées par le docteur Sylvain Briault avaient montré l’association de cas de déficience mentale et de trouble autistique avec une activité anormale du canal potassique BKCa. Dans le cas du syndrome de l’X fragile, ce canal est « normal » mais deux fois moins présent que chez les sujets sains. BKCa a donc été identifié par les chercheurs de l’INEM comme une potentielle nouvelle cible thérapeutique.

L’équipe a testé la molécule BMS 204352 qui est capable d’ouvrir ce canal. Cette molécule a déjà fait l’objet d’un essai clinique de phase III au cours duquel aucune toxicité n’a été observée. Des éléments qui ont encouragé ce choix, même si son administration sera différente de celle précédemment développée. Les résultats prometteurs obtenus in vitro ont amené les chercheurs à poursuivre les essais in vivo sur un modèle de souris porteuse du syndrome de l’X fragile. Ils ont constaté que cette molécule ouvre très largement les canaux potassiques existant et accroît considérablement leur activité, la rendant équivalente aux témoins. Ainsi le comportement –cognitif, émotionnel, social- des souris modèles du syndrome de l’X fragile est devenu similaire à celui des souris sauvages, témoins de cette étude. L’utilisation de cette molécule pour le traitement du syndrome de l’X Fragile a fait l’objet d’un dépôt de brevet(2) par le CNRS, l’université d’Orléans et le Centre hospitalier régional d’Orléans en 2011. Il est valorisé par FIST SA, filiale de valorisation du CNRS et de BPI France dont l’une des missions est le transfert vers l’industrie de technologies innovantes. Il s’agit de la première étape d’un long travail de recherche et cela ne présume pas de résultats éventuels chez l’homme.

Il s’agit de la première désignation orpheline demandée par le CNRS. L’élaboration complexe de ce dossier s’est faite en étroite collaboration avec FIST SA et la Fondation maladies rares, structure nationale de coordination et de financement de la recherche sur les maladies rares et a reçu le soutien méthodologique d’Orphan Dev/F-CRIN, plateforme nationale dédiée aux essais cliniques dans les maladies rares. Une demande complémentaire sera également déposée prochainement auprès de la FDA (Food and drug administration) pour l’obtention d’une désignation orpheline aux Etats-Unis.

Cette désignation présente plusieurs avantages : l’assistance protocolaire gratuite de l’Agence européenne du médicament pour conduire les essais cliniques et guider le demandeur dans sa demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM) et l’exclusivité commerciale pendant 10 ans au sein de l’Union européenne après l’obtention de l’AMM, indépendamment du brevet.

Deux bénéfices importants pour poursuivre le développement d’un médicament et faciliter sa valorisation auprès des industriels du médicament.

(1) Appelée également Flindokalner : (3S)-(+)-(5-chloro-2-methoxyphenyl)-1,3-dihydro-3-fluoro-6-(trifluoromethyl)-2H-indol-2-one
(2) N° de brevet : WO2013001412 – DI 04388-01

Références : Hébert et al.: Rescue of fragile X syndrome phenotypes in Fmr1 KO mice by a BKCa channel opener molecule. Orphanet Journal of Rare Diseases 2014 9:124

Source : CNRS